LE MONDE MAGAZINE | 04.10.10 | 12h26 • Mis à jour le 04.10.10 | 12h27
Hors-série du "Monde" sur le Brésil, en vente jusqu'au 6 novembre, en kiosque (7,50 euros)DR
Classée troisième (19,35% des voix) au premier tour de l'élection présidentielle brésilienne, la candidate écologiste, Marina Silva, va jouer un rôle clé pour le second tour, le 31 octobre, entre Dilma Rousseff, candidate du Parti des travailleurs (PT), arrivée en tête, dimanche, avec 46,9% des suffrages, et le social-démocrate José Serra (32,6%). Voici son portrait extrait du hors-série du Monde sur le Brésil publié avant le premier tour.
Elle se compare à une jaguatirica, l'ocelot d'Amazonie, ce chat sauvage "paisible et léger" mais qui attaque toutes griffes dehors, et "s'isole pour lécher ses plaies", avant de repartir à l'assaut. Marina Silva a la patience intrépide d'un félin. Douce, frêle et déterminée.
En mai 2008, la ministre brésilienne de l'environnement démissionne. Le président Lula, son aîné, son ami, ne l'appuie pas assez, explique-t-elle, dans son combat pour un développement durable. En 2009, elle quitte le Parti des travailleurs (PT) et rejoint le petit Parti vert (PV). Sous sa bannière, elle brigue la présidence de la République.
L'histoire de Marina Silva ressemble à celle de Lula. Issue d'une famille nombreuse et très pauvre, elle a, comme lui, pris en main son destin. Et avec peut-être encore plus de mérite, car elle est femme et métisse.
Elle naît en 1958 dans une petite communauté de seringueiros – les récolteurs de latex – de l'Etat amazonien d'Acre. Le sang portugais et celui des anciens esclaves se mêlent dans ses veines. Elle découvre le marxisme à l'université, devient professeur d'histoire, milite contre la dictature militaire et se lance dans l'action syndicale. Conseillère municipale, puis membre de l'Assemblée législative locale, elle devient à 35 ans la plus jeune sénatrice de l'histoire du Brésil.
LÂCHÉE PAR LULA
AFP/VANDERLEI ALMEIDA
Ministre, elle bataille contre les adeptes de la croissance à tout prix. Face à l'agrobusiness, elle tente de résister au soja transgénique. En vain. Elle réussit à réduire le rythme du déboisement de l'Amazonie. Mais lorsqu'elle prétend imposer à chaque projet le respect scrupuleux de l'environnement, elle s'aperçoit que Lula, sans le dire, la "lâche" et Marina Silva préfère tirer sa révérence.
Elle a pour atouts sa cohérence politique et sa rectitude morale. Elle évite toute attaque personnelle mais critique les partis qui n'ont pas, à ses yeux, compris la force de la "grande utopie du XXIe siècle" : le développement durable.
Mère de quatre enfants issus de deux mariages, Marina Silva est une personnalité complexe, politiquement progressiste et socialement conservatrice. Elle a pour handicap la faible influence du Parti vert, qui n'aura droit qu'à un temps d'antenne limité lors de la campagne officielle à la télévision. Les sondages ne lui promettent au mieux que 10 % des suffrages, mais sa présence dans la course contribue à faire de l'environnement l'un des grands thèmes de la campagne.
Article paru dans l'édition du 05.10.10Le Monde