quinta-feira, 30 de setembro de 2010

Brésil : les années Lula, une assez belle histoire

Le Financial Times le représente dans la figure du Christ rédempteur, la statue qui, du haut du mont Corcovado, domine la baie de Rio de Janeiro. Bras grands ouverts, protecteur, veillant pour l'éternité sur ses concitoyens. Aux Oscars d'Hollywood 2011, le film qui portera les couleurs du Brésil est un long-métrage retraçant sa vie : Lula, le fils du Brésil. A cette date, le président Luiz Inacio Lula da Silva aura quitté le pouvoir - quasi sanctifié, héros national, avec un taux de popularité record. L'élection présidentielle a lieu cet automne.


Dilma Rousseff, 62 ans, la candidate adoubée par Lula est donnée gagnante : portée par le soutien du "grand homme", elle pourrait l'emporter dès le premier tour, le 3 octobre. Elle entrera en fonctions en janvier. Ce sera la fin des "années Lula", ces deux mandats exercés à la tête de l'Etat par le chef du Parti des travailleurs, l'ancien patron du Syndicat de la métallurgie, huitième enfant d'une famille modeste, qui quitte l'école à 12 ans pour devenir cireur de chaussures, vendeur de cacahuètes puis tourneur dans une firme automobile à 14 ans. De cette adolescence en usine, le président Lula da Silva porte la marque : un doigt amputé - pas si fréquent dans la corporation.

C'est tout cela qui crée le mythe. Mais pas seulement. Si les années de la présidence Lula, 2002-2010, sont célébrées à plaisir, c'est parce que l'homme incarne un moment-clé dans l'histoire du pays : l'accès du Brésil au statut de grande puissance émergente. Avec la Chine, l'Inde et quelques autres, le Brésil est l'un de ces Etats qui modifient la carte de la répartition du pouvoir en ce début de XXIe siècle. Lula est le porte-drapeau de cette transformation, le passage de la puissance virtuelle - "le Brésil, ce pays d'avenir et qui le restera longtemps", disait-on au début du siècle dernier - à la puissance réelle.

C'est d'abord un succès économique. L'ancien chef du Syndicat des métallos "a eu l'intelligence de surfer sur la politique menée par son prédécesseur", explique Alfredo Valladao, professeur à Science Po et animateur du centre d'études Union européenne-Brésil. Lula parachève l'oeuvre du président Fernando Henrique Cardoso, l'homme de la stabilisation du real, la monnaie nationale : orthodoxie monétaire, privatisations, ancrage du pays dans la mondialisation. Réaliste mais fidèle à ses engagements, Lula y ajoute sa marque sociale : hausse du salaire minimum, bourse d'aide pour les familles les plus pauvres.

Huitième économie mondiale, le Brésil - 190 millions d'habitants - cumule une liste d'atouts proprement scandaleuse : richesses naturelles infinies, industrie diversifiée et, dans ce pays grand comme quinze fois la France, une exploitation de la terre qui en fait la première puissance agricole mondiale.

En seize ans - les mandats Cardoso et Lula -, la classe moyenne, déjà centrale, s'est accrue de 35 millions de personnes. L'économie s'appuie sur une forte demande intérieure ; elle peut résister aux chocs extérieurs. Elle est portée par une confiance dans l'avenir que transcrivent tous les sondages. Les Brésiliens sont optimistes pour leur pays, convaincus, à l'inverse des Européens ou même des Américains, que leurs enfants vivront mieux qu'eux. Cette assurance, c'est aussi Lula, grande gueule, sourire jovial, épaules de bûcheron, charme à revendre.

Lula prédit : "Le Brésil ne restera pas à l'écart du XXIe siècle, comme ce fut le cas au XXe." Fort du poids de son économie, le Brésil, comme ses compagnons du ticket de tête des puissances émergentes, la Chine et l'Inde, veut sa part de pouvoir politique dans l'arène internationale. Il réclame un siège de membre permanent au Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies (ONU) ; plus de droits au Fonds monétaire international (FMI) ; la mort du G8, qui réunit les puissances les plus anciennes, celles du Nord, au profit de la pérennisation du G20, où des pays comme le Brésil, la Turquie et l'Indonésie jouent un rôle à la hauteur de leur importance économique.

Le Brésil veut peser sur les affaires du monde. Mais dans quel sens ? Ici, pas de naïveté, pour justifiée qu'elle soit, cette ambition ne doit pas être interprétée comme particulièrement altruiste ou généreuse. La diplomatie Lula est celle d'une puissance qui défend d'abord ses intérêts. Elle est le parfait reflet du comportement des émergents sur la scène internationale.

Les émergents sont, le plus souvent, libre-échangistes : à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), le Brésil veut un nouveau round de libéralisation des échanges et peste contre le protectionnisme agricole de l'Europe. Les émergents sont souverainistes : rien n'est plus étranger à des pays comme le Brésil ou la Chine que l'idée d'un droit d'ingérence - fût-il humanitaire - qui viendrait empiéter sur le principe de la souveraineté des Etats. Et de cette position découle une autre : les émergents ne sont pas droits de l'hommistes , au sens où la défense de certains principes justifierait sinon d'enfreindre celui de la souveraineté des Etats, du moins d'être prudent dans le choix de ses amitiés.

C'est la face sombre des années Lula. Au nom d'une solidarité Sud-Sud, il copine avec l'Iranien Mahmoud Ahmadinejad au-delà de ce qu'imposerait la realpolitik ; au lendemain d'élections truquées, en fait transformées en putsch militaire par le même Ahmadinejad, il tonne, péremptoire, qu'il n'y a pas eu de fraude à Téhéran ; en visite à Cuba, bras dessus, bras dessous avec un autre barbu, il se moque de la grève de la faim observée par les prisonniers politiques du régime castriste - lui qui, un temps incarcéré par la dictature militaire brésilienne, mena aussi une grève de la faim...

C'est une leçon. Même présidée par Lula, une puissance émergente reste un Etat ; elle n'est pas une ONG.

Post-scriptum : Cette chronique emprunte honteusement au "Hors-série" du Monde, Brésil, un géant s'impose (98 pages, 7,50 €), en vente jusqu'en novembre, et qui doit beaucoup à Martine Jacot et à notre correspondant à Rio, Jean-Pierre Langellier.


Alain Frachon (Chronique "International")



Courriel : frachon@lemonde.fr.
extraído do jornal Le Monde 


TRADUÇÃO:





Lula é o porta-estandarte da transformação do Brasil de potência virtual para potência real 
Foto: Lula é o porta-estandarte da transformação do Brasil de potência virtual para potência real

O “Financial Times” o retratou como o Cristo Redentor, a estátua que, do alto do Corcovado, domina a baía do Rio de Janeiro. De braços abertos, protetor, zelando para sempre pelos brasileiros. Na premiação do Oscar 2011, o filme que representará as cores do Brasil é um longa-metragem que conta sua vida: “Lula, o filho do Brasil”. Até esse dia, o presidente Luiz Inácio Lula da Silva já terá deixado o poder – quase santificado, herói nacional, com um índice de popularidade recorde. A eleição presidencial acontecerá neste semestre.

Dilma Rousseff, 62, a candidata consagrada por Lula, está sendo dada como vencedora: levada pelo apoio do “grande homem”, ela poderá ganhar logo no primeiro turno, no dia 3 de outubro. Ela assumirá o cargo em janeiro. Será o fim dos “anos Lula”, os dois mandatos exercidos à frente do Estado pelo líder do Partido dos Trabalhadores, ex-líder do sindicato dos metalúrgicos, oitavo filho de uma família humilde, que deixou a escola aos 12 anos para se tornar engraxate de sapatos, vendedor de amendoins e depois torneiro mecânico na indústria automobilística aos 14 anos. Dessa adolescência passada em fábrica, o presidente Lula guarda a marca: um dedo amputado – não muito frequente na profissão.

Foi tudo isso que criou o mito. Mas não só isso. Se os anos da presidência Lula, 2002-2010, são celebrados desenfreadamente, é porque o homem está encarnando um momento-chave na história do país: o acesso do Brasil ao status de grande potência emergente. Juntamente com a China, a Índia e alguns outros, o Brasil é um dos Estados que estão modificando o mapa da distribuição do poder nesse início de século 21. Lula é o porta-estandarte dessa transformação, a passagem da potência virtual – “o Brasil, esse país do futuro e que continuará o sendo por muito tempo”, diziam no início do século passado – para potência real.

Primeiramente, é um sucesso econômico. O ex-líder do sindicato dos metalúrgicos “teve inteligência para aproveitar a onda da política conduzida por seu antecessor”, explica Alfredo Valladão, professor no Instituto Sciences Po e coordenador do centro de estudos União Europeia-Brasil. Lula aperfeiçoou a obra do presidente Fernando Henrique Cardoso, o homem da estabilização do real, a moeda nacional: ortodoxia monetária, privatizações, estabelecimento do país na globalização. Realista, mas fiel a seus compromissos, Lula somou a isso sua marca social: aumento do salário mínimo, bolsa de auxílio às famílias mais pobres.

Oitava economia mundial, o Brasil – 190 milhões de habitantes – acumula uma lista de trunfos impressionantes: riquezas naturais infinitas, indústria diversificada e, nesse país que tem 15 vezes o tamanho da França, um aproveitamento de terras que faz dele a principal potência agrícola mundial.

Em 16 anos – os mandatos FHC e Lula - , a classe média, já central, ganhou 35 milhões de pessoas. A economia se apoia em uma forte demanda interna e consegue resistir aos choques externos. Ela é levada por uma confiança no futuro apontada por todas as pesquisas de opinião. Os brasileiros estão otimistas em relação ao seu país; ao contrário dos europeus ou até mesmo dos americanos, eles estão certos de que seus filhos viverão melhor do que eles. Essa confiança também tem Lula, falastrão, de sorriso jovial, ombros de lenhador, charme para dar e vender.

Lula prevê: “o Brasil não ficará de fora do século 21, como foi o caso no século 20”. Fortalecido pelo peso de sua economia, o Brasil, assim como seus companheiros do topo das potências emergentes, a China e a Índia, quer sua parte de poder político na arena internacional. Ele briga por uma vaga de membro permanente no Conselho de Segurança da ONU; por mais direitos no Fundo Monetário Internacional (FMI); pelo fim do G8, que reúne as potências mais antigas, as do Norte, em benefício da perpetuação do G20,onde países como o Brasil, a Turquia e a Indonésia exercem um papel à altura de sua importância econômica.

O Brasil quer ter peso sobre as questões do mundo. Mas em que sentido? Aqui, sem ingenuidade: por mais justificada que seja, essa ambição não deve ser interpretada como particularmente altruísta ou generosa. A diplomacia de Lula é a de uma potência que defende primeiramente seus interesses. É o perfeito reflexo do comportamento dos emergentes no cenário internacional. Os emergentes são, na maioria das vezes, adeptos do livre-comércio: na Organização Mundial do Comércio (OMC), o Brasil quer uma nova rodada de liberalização do comércio e protesta contra o protecionismo agrícola da Europa. Os emergentes são soberanistas: nada é mais estranho a países como o Brasil ou a China do que a ideia de um direito de ingerência – ainda que humanitário – que passaria por cima do princípio da soberania dos Estados. E dessa posição advém outra: os emergentes não são adeptos dos direitos humanos, no sentido em que a defesa de certos princípios justificaria se não transgredir aquele da soberania dos Estados, pelo menos ser prudente na escolha de suas amizades.

É o lado sombrio dos anos Lula. Em nome de uma solidariedade Sul-Sul, ele mantém com o iraniano Mahmoud Ahmadinejad uma relação de camaradagem além do que uma política real exigiria; no dia seguinte às eleições fraudadas, na verdade transformadas em golpe militar pelo mesmo Ahmadinejad, ele esbravejou, peremptório, que não havia ocorrido fraude em Teerã; em visita a Cuba, de braços dados com outro barbudo, ele fez pouco da greve de fome mantida pelos prisioneiros políticos do regime castrista – ele que, preso por um tempo pela ditadura militar brasileira, também fez greve de fome...

É uma lição. Mesmo presidida por Lula, uma potência emergente continua sendo um Estado; ela não é uma ONG.

Post Scriptum
Esta crônica foi inspirada na série especial do Le Monde, “Brasil, um gigante se impõe” (98 páginas, 7,50 euros), à venda até novembro, e que deve muito a Martine Jacot e a nosso correspondente no Rio de Janeiro, Jean-Pierre Langellier

Tradução: Lana Lim

enviado por MVM = News